Accéder librement et en ligne à une base de données (data) des décisions judiciaires. Est-ce souhaitable? C’est en tout cas souhaité, comme le démontre le succès de Legifrance, dont la base de données reste cependant limitée aux décisions publiées. L’open data des décisions de justice suscitait cependant certaines inquiètudes. Notamment, celle de parvenir à concilier respect de la vie privée et droit du public à l’information.
Les contours de l’open data des décisions de justice
Anonymisation obligatoire des décisions de justice
En mars 2019, le projet de loi de programmation pour la justice est soumis pour validation au Conseil Constitutionnel. Cette loi a, entre autres, pour objectif de généraliser la transmission gratuite, automatique, par voie éléctronique, des décisions judiciaires.
Cette consécration de l’open data des décisions de justice est cependant encadrée par :
- l’anonymisation systématique des noms et prénoms de toute personne, partie ou tiers au jugement,
- l’obligation pour les gestionnaires publics de la base de donnée de masquer
tout élément permettant d’identifier les parties, les tiers, les magistrats et les membres du greffe (…) lorsque sa divulgation est de nature à porter atteinte à la sécurité ou au respect de la vie privée de ces personnes ou de leur entourage.
Le Conseil constitutionnel n’a pas validé cette dernière obligation, faute pour la loi de prévoir un contrôle suffisant.
Data des décisions judiciaires et justice prédictive
En outre, la loi prévoyait l’interdiction de réutiliser une base de données judiciaires pour faire du « profilage » de juges ou de tribunaux.
Or, tout l’intérêt de l’open data est justement de pouvoir compiler des données pour réaliser un traitement prédictif.
La « justice prédictive » permettrait de pouvoir quantifier un risque ou « prédir » le droit applicable en analysant les décisions de justice. C’est une forte attente à la fois des justiciables, mais également des avocats dont le champ de la la responsabilité ne cesse de s’agrandir.
Plusieurs plateformes se sont lancées dans le créneau de la justice prédictive, comme par exemple Predictice.
Le Conseil constitutionnel a validé cette restriction, à la condition qu’elle vise uniquement le profilage
pouvant conduire à des pressions ou à des stratégies de choix de juridiction de nature à altérer le fonctionnement de la justice.
La mise en oeuvre de l’open data des décisions de justice
Ainsi, la loi de programmation prévoit l’open data des décisions de justice et renvoie à un décret d’application pour sa mise en oeuvre.
Le Ministère de la Justice a annoncé la parution de ce décret dont le projet va être soumis au Conseil Constitutionnel.
L’open data des décisions de justice sera réalisée sur un portail internet géré par le garde des Sceaux. Chaque ordre de juridiction aura son propre site, déclaré à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Cette mise à disposition sera faite sous forme éléctronique et sous le controle de la Cour de cassation.
Les décisions seront publiées dans un délai de 6 mois à compter de leur mise à disposition par le Greffe.
Le projet de décret vient également préciser le dispositif d’effacement de données permettant d’identifier des parties, juges, personnels de greffe ou leurs proches.
Il est donc indiqué que cette décision devra être prise par :
- le juge ayant rendu la décision concernant les parties,
- le président de la juridiction concernée pour les magistrats du siège ou juges consulaires,
- le Procureur de la République pour les magistrats du Parquet.
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